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Comprendre et (re)connaître le travail d’un (bon) éleveur canin

Etre éleveur c’est par définition « faire naître » mais derrière ce « faire naître » il y a avant tout un travail. Le premier travail d’un éleveur est un travail de sélection. Des connaissances approfondies de la race qu’il élève et à l’intérieur de cette même race, des lignées qu’il travaille.

Avoir de solides connaissances en comportement canin est essentiel, d’une part pour avoir la bonne lecture des reproducteurs et leur assurer une bonne éducation, et d’autre part pour pouvoir comprendre les chiens et reconnaître les petits tempéraments des chiots et ainsi savoir quel environnement leur conviendra le mieux.

Actualiser ses connaissances est aussi très important, on peut réajuster certaines choses, s’améliorer, et mieux conseiller encore.

L’éleveur s’assurera quand il choisit un accouplement, de la bonne santé des parents, et des ascendants et collatéraux mais il veillera également à marier des chiens de tempéraments stables et toujours dans l’équilibre. (Ex : si un mâle est actif, on lui choisira une femelle calme / si un chien est trop dans l’attachement on lui choisira une femelle plutôt indépendante)

De la sélection des parents va découler une partie des tempéraments des petits. Oui une partie car la génétique n’est pas une science exacte, certains petits tiendront plus de « maman », d’autre de « papa » et d’autres seront un mélange des deux pas forcément dans des proportions égales. Une partie aussi car, même s’il y a l’innée, l’acquis est là aussi.

Le travail de sélection, l’éleveur devra aussi l’effectuer avec l’humain, en choisissant les familles adéquates pour ses bébés, et en conseillant sur le choix du chiot par rapport au rythme de vie des futurs propriétaires, de leur attente, de leur tempérament, de la composition de leur famille, humaine, à poil, à sabot ou à plume (liste non exhaustive), de leur environnement etc…

Une fois le RDV amoureux effectué et s’il y a gestation, les bébés naîtront env. 62 jours plus tard.

Le comportement de la maman pendant la deuxième moitié de gestation peut changer. Il faut qu’elle se sente en sécurité, et les éleveurs seront attentif à toute forme de manifestations de stress. Car comme chez l’humain, le stress d’une maman est communiqué aux petits (pendant la gestation et bien sur après la naissance également)


La naissance et les premiers jours de vie

Le petit nid douillet de la maman a été préparé une dizaine de jours avant, afin qu’elle s’approprie cet espace et s’y sente à l’aise et bien.

L’ideal est de recréer un espace confiné à l’abri des regards des autres. La maman en a besoin, la mise bas et les premiers jours de vie des bébés sont des choses intimes que les mamans ne partagent en général qu’avec leur éleveur, car elles sont en totale confiance. On installe une lampe chauffante pour garder une bonne température dans « le nid » celle-ci doit être placée correctement pour assurer une bonne chaleur puisque la survie des bébés en dépend, en dessous d’une certaine température les chiots se refroidissent et ils ne peuvent plus digérer. Ils ne régulent pas encore leur température. S’il fait trop chaud, il y a un fort risque de déshydratation et les chiots s’écartent les uns des autres, les privant de ce contact essentiel avec leur maman et les autres.

Les bébés naissent sourds et aveugles. Ils se déplacent très lentement en rampant. C’est leur odorat qui leur permet de retrouver leur maman et surtout la mamelle.

L’attachement et le suivi commencent déjà là !

Les mamans ne quittent que rarement les bébés pendant les premiers jours de vie. Seulement pour faire leur besoin, on place alors l’eau et la nourriture à volonté à côté d’elles, leur proposant même quand les tétées durent longtemps, pour ne pas qu’elles aient à se déplacer.

Une mise bas peut durer plus de 12h, c’est une épreuve physique importante.

On pourra aider si la maman manque de lait ou en cas de grosse portée ou césarienne en biberonnant.

Les chiots se regroupent toujours pour dormir. Ils cherchent le contact et dorment « en tas »



Au bout de quelques jours, les chiots, encore aveugles et sourd, sont capables de sentir notre présence. Oui toujours l’odorat, et ils nous « cherchent » dans la caisse de mise bas. Ils nous connaissent puisque tous les jours, on manipule et on pèse chaque bébé pour être sûr de ne pas passer à côté d’un éventuel problème.

La maman allaite ses bébés et les stimule pour les besoins en les léchant (parties génitales), ainsi le chiot peut uriner et déféquer. Pour ça elle les placera d’un geste du museau sur le dos pour avoir accès. Là encore on est dans la mise en place précoce d’un fort signal d’apaisement



De 15 jours à 4 semaines

En deux semaines, des évolutions extraordinaires qui vont commencer par la vue, les paupières se décollent entre 12 et 14 jours mais à ce stade ils ne voient que les ombres / formes qui se déplacent. Bien sûr, ces formes c’est « maman » et ils suivent donc ce mouvement. Oui le suivi naturel arrive à grand pas.

Quelques jours plus tard, c’est l’ouïe qui arrive même s’ils étaient capables de capter des vibrations émises par leur maman, maintenant ils entendent

Ils ont maintenant aussi conscience qu’ils ne sont pas seul et à partir de 3 semaines on peut observer les premières interactions, qui se limitent à essayer de téter « l’autre », attraper la queue du frère ou de la sœur, s’observer.

Après 3 semaines, commencent la diversification alimentaire et ça tombe bien car c’est le moment ou les petites dents ont percé la gencive, les tétées deviennent douloureuses pour la maman et elle l’exprime. Elle va peu à peu restreindre le nombre de tétée en interdisant l’accès aux mamelles et en réprimandant les petits audacieux téméraires.

La réprimande ? Non la maman n’attrape pas le chiot par la peau du cou en secouant. Jamais. Ce comportement n’existe pas ! (Chez les sujets sains d’esprit) - Bien sûr l’humain ne devra jamais, avoir ce genre d’action.

La maman attrape délicatement le museau et/ou la tête du chiot pour stopper l’action. Si ça ne suffit pas, elle serrera un peu ce qui suffit à faire renoncer.


La capacité à renoncer et la frustration sont en cours d’acquisition

La maman accordera quelques tétées, dans leur joie de pouvoir encore boire un peu de lait aux mamelles, certains chiots iront « un peu trop fort », la maman corrigera de la même façon. Ici elle travaille sur le contrôle de la mâchoire. Ce dont l’humain aura aussi besoin dans les phases de mordillement du chiot.

A partir de 15 jours, les déplacements sont plus assurés, les mécanismes de la marche commencent à être acquis, les petits popotins se lèvent pour déféquer.

A partir de 3 semaines, le chiot s’écarte de son « nid » pour faire ses besoins. Il est donc propre (au sens canin du terme = je ne fais pas là ou je dors et là ou je mange)

La distance s’agrandira au fil des semaines.

La maman prend de plus en plus de « temps de pause » en laissant les bébés lors des siestes et surtout s’endormir seuls, sans elle. C’est le début de l’apprentissage de la solitude (qui n’en est pas encore une vraie puisqu’ils vivent en fratrie)

L’éleveur donnera (bouillie puis croquettes) en quantité suffisante pour qu’il en reste toujours (ainsi il n’y aura pas d’enjeu pour la nourriture) Aussi il faudra avoir des gamelles « nourrisseur » pour que les petits puissent manger tous ensemble et garder cet esprit de contact pendant les rations (qu’ils ont eu pendant les tétées)


De 4 à 9 semaines

Le langage canin se met en place, les interactions sont de plus en plus nombreuses. Et la maman commence à éduquer sérieusement. Comme chez l’humain, toutes les mères n’accordent pas la même importance à tout. Certaines sont en constante gestion (couchent les petits pour leur sieste, assurent un périmètre de sécurité que les petits ne doivent pas franchir etc…)

D’autres sont plus permissives. Tout dépendra de ce qui est important pour elles.

L’idéal donc est d’avoir des « tatas « ainsi les chiots auront le bénéfice de connaitre plusieurs comportements canins et d’être éduqués sur différents points. Ils auront aussi une meilleure adaptation aux congénères par la suite.

Il est primordial de ne jamais laisser les chiots seuls, et qu’ils aient toujours un référent canin bien codé et serein . Les chiots agissant par imitation .

Dans cette période , tout est important, le chiot va apprendre à vivre en communauté canine mais il devra aussi s’adapter au monde des humains .

L’apprentissage de la frustration est une étape importante. La maman va prendre quelque chose de très intéressant en gueule, va se coucher à proximité des bébés et leur interdira d’y toucher . Parfois un simple regard fixe suffit , par ce regard elle dit « non » , les petits intrépides iront tout de même voir cet objet si intéressant , la maman déploiera alors ses codes canins , crescendo , d’abord en montrant les dents, puis elle accompagnera de grognements, puis elle attrapera le museau ou la tête du petit impertinent et en dernier lieu elle pourra pincer . Dans une juste mesure tout de même. En observant , on constate que la maman laissera l’accès à l’objet quand le chiot aura renoncé.

Quand une maman réprimande, elle lâchera la pression de sa mâchoire, quand le chiot « couine » ce qui est un formidable apprentissage pour le chiot. Par imitation de ce comportement, quand les chiots seront en plein jeu de bagarre , si un attrape trop fort et que l’autre « couine » , le premier devra lâcher . S’il ne lâche pas, la maman interviendra pour le réprimander et/ou séparer les deux chiots. Les chiots apprennent donc à contrôler leur mâchoire et la pression , et bien sur à gérer leur excitation.


Les mamans (et les tatas) corrigent toujours l’excitation.

C’est donc à nous, humains, de continuer ce formidable travail d’éducation en ne gâchant pas le travail de la maman . On ne proposera donc pas de jouets « pouics » puisqu’ils favorisent le mordillement et apprennent à « ne pas lâcher » si ça pouic. Ce type de jouets est en parfaite contradiction avec ce que la maman apprends à ces bébés. Il pourra en découler des mordillements forts sur les congénères et/ou l’humain, une excitation montante difficile à canaliser par la suite et un plaisir à faire « couiner » (enfant, NAC, chiens , etc…) et donc d’entrainer des blessures

Les chiots (et les chiens adultes) ont néanmoins des besoins de mordiller (=besoins masticatoires). On propose donc très tôt dans le parc à chiot des jouets en cordes, toutes simples que les petits pourront mordiller sans danger pour eux . Le fait que les cordes soient dures favorise aussi les autos contrôles puisque s’ils mordillent trop fort, ce ne sera pas agréable.

On peut observer que certaines mamans sont très fines en éducation quand elles corrigent. Un chiot qui s’éloigne, la maman rappelle, le chiot ne revient pas ou mets du temps à revenir, à son retour la maman attrapera ses pattes jusqu’à son retour près des autres et elle l’invitera à rester en place en mettant un peu de pression avec son regard et sa posture, l’empêchant de bouger s’il le faut. Alors que pour le mordillement, elles attraperont le museau ou la tête entière.

Le chiot apprend aussi les signes de politesse. On ne se dirige pas droit sur un chien, c’est une impolitesse voire une agression. Le chiot arrive en courbe vers un adulte, il lèche les babines de la maman ou des tatas présentes en guise de politesse. Si l’adulte réprimande, le chiot présentera alors ses parties génitales en signe pacifique. On ne parlera pas de soumission, car dans d’autres situations dans lesquelles un chien (bien dans ses pattes) tente de détendre un autre chien stressé (voir agressif), il peut adopter cette posture pour lui dire « hey ho tout va bien, zen ».


Ceci est vraiment un signal d’apaisement :


Ceci n’est pas un dominant qui soumet un chien. C’est mâle adulte bien codé qui signifie à un autre mâle de 8 mois qui est excité que son comportement n’est pas le bon :